L’Esprit de la Terre

Parc National des Volcans, en Auvergne. Le chantier d’un tronçon de l’autoroute A89, éventre ce paysage sublime.

Les travailleurs du chantier et les énormes machines ouvrent la terre. Démesure, violence, une plaie géante. J’ai le cœur gros devant cette dévastation.

Mais ce n’est pas si simple : je jubile aussi. Le chantier, par sa violence même, m’offre ce qui était caché : l’intimité de la terre, ses couleurs secrètes, son histoire géologique… Il m’offre aussi à profusion, arrachées aux entrailles de la terre, des pierres que je lève et mets en équilibre pour former des Guetteurs qui cette fois se dresseront pour symboliser l’Esprit de la Terre. Ambivalence, tension entre douleur et enthousiasme, voilà le fil conducteur de mon travail . Je veux à la fois témoigner de la beauté de ce monde qu’on mutile (c’est à coup sûr une protestation ) et témoigner de l’élan épique de cette aventure (n’est-ce pas là une approbation ?). Au moment où je travaille, je ne suis pas en train de juger : je donne à voir. Et je participe en offrant cet hommage à l’Esprit de la Terre : chaque pierre que je relève lui dira mon amour et dira à tous la violence du monde et la splendeur du monde.